Les taux d’emploi sont presque revenus aux niveaux antérieurs à la crise ; de moins en moins de personnes sont contraintes de sauter des repas ; et près de 80 pour cent des enfants ont repris l’école. On pourrait croire que la situation s’améliore en Sierra Leone, mais de nombreux progrès restent à faire.
Tandis que le pays continue de lutter contre Ebola (qui a infecté plus de 13 000 personnes et fait 3 932 victimes), plus des deux tiers des foyers demeurent en situation d’insécurité alimentaire et près d’un tiers des habitants ont un salaire et des bénéfices bien inférieurs à ceux d’avant la crise. Il semblerait en outre que les taux de malnutrition restent élevés chez les enfants de moins de cinq ans.
IRIN a rencontré des Sierraléonais qui tentent d’aider leurs communautés à se relever des impacts secondaires de l’épidémie.
« Ebola a profondément bouleversé les projets agricoles du village », a dit Foday Kargbo, le chef adjoint du village de Mansantigie, à la périphérie de Freetown, qui a été gravement affecté par les mesures de couvre-feu et de quarantaine.
Du fait de ces restrictions, « les gens ont peur de se déplacer ou de cultiver la terre », a-t-il dit.
Alors que le riz est plus fragile que d’autres cultures, les zones rizicoles ont été particulièrement touchées au plus fort de la crise Ebola.
Au moins 28 pour cent des commerçants interrogés par FWS NET, le réseau de systèmes d'alerte rapide en cas de famine, ont rapporté que leurs récoltes de riz restaient inférieures à la moyenne.
Même pour les agriculteurs ayant pu continuer à cultiver leurs terres, des restrictions à l’importation ont été mises en place au plus fort de la crise, et de nombreux marchés locaux ont fermé : ils n’avaient plus nulle part où vendre leurs récoltes.
Hannah Kamanda, qui vend habituellement du gari - un sous-produit du manioc transformé – au marché Waterloo, a dit à IRIN :
« Avant Ebola, le commerce du gari marchait bien, mais ça s’est beaucoup dégradé. Comme il s’agit de ma seule source de revenus, il est devenu extrêmement difficile de subvenir aux besoins de ma famille. »
Mme Kamanda a quatre enfants, et élève les sept enfants de son frère depuis que ce dernier a succombé à Ebola l’an dernier :
« C’est parfois un vrai défi de pourvoir aux trois repas quotidiens », a dit Mme Kamanda à IRIN. « Au plus fort de l’épidémie d’Ebola, nous sommes restés longtemps à ne prendre qu’un repas par jour. Aujourd’hui, la faim fait partie du quotidien de ma famille. Nous prions pour que le pays soit bientôt libéré d’Ebola, parce qu’aujourd’hui les affaires ne marchent pas bien. »
Mme Kamanda craint de ne pas être en mesure d’honorer le prochain loyer de son magasin si les affaires ne reprennent pas rapidement.
Jeneba Mansaray, dont le mari travaille comme pêcheur au quai de Mabala, à Freetown, a vécu une histoire semblable :
« Depuis l’arrivée d’Ebola, mon mari ne gagne plus autant qu’avant », a-t-elle dit.
« Il nous arrivait souvent d’être à court de nourriture. Nous devions supplier nos voisins de nous aider. L’un de mes enfants a failli mourir de faim, car il était très faible après près de deux semaines à se nourrir exclusivement d’eau et de gari séché. C’était insupportable. »
Dans le cadre de la Semaine nationale de la santé maternelle et infantile, environ 1,2 million d’enfants ont accès à toute une série d’interventions (comprimés vermifuges, suppléments en vitamine A, vaccins), tandis que les femmes en âge de procréer sont vaccinées contre le tétanos néonatal.
La malnutrition reste un immense défi pour la Sierra Leone. En 2014, l’enquête nutritionnelle nationale a révélé que 28,6 pour cent des enfants de moins de cinq ans étaient atteints de malnutrition chronique. Près de 13 pour cent d’entre eux présentaient une insuffisance pondérale.
Lucy M. M. Coker, qui travaille comme infirmière au service Malnutrition du Cottage Hospital de Freetown, a dit à IRIN que le nombre d’enfants malnutris était en hausse dans la capitale depuis l’épidémie d’Ebola.
Mme Coker a dit qu’il restait difficile de convaincre les parents de faire soigner leurs enfants, car de nombreuses personnes craignent encore de contracter Ebola en se rendant à l’hôpital : « Ebola n’est pas encore terminé », a-t-elle dit à IRIN. « Et lutter contre les problèmes de malnutrition reste un défi considérable dans notre pays. »